Miroir brisé
Le monstre en moi s’effraie
D’apercevoir son reflet.
L’idée de suicide gagne
Lucidité qui l’accompagne.
Mes dix calmants dissipent le brouillard :
Un visage apeuré émerge de la brume,
C’est un enfant à l’école battu,
Le début de mes espoirs déçus.
Et l’innocence consumée dans l’amertume
Le maquille des traits d’un aigri vieillard.
Je voudrais une vie juste et sans fard,
Mais la haine est une douce putain
Née de la souffrance d’un gamin.
On la jette au visage du social.
Éconduite, nous revient la fatale :
Une amante démente qui ne rêve que du noir.
Et un jour les yeux tout injectés de sang
On se dit : aujourd’hui, c’est bien moi le méchant.
Et l’on brise son destin pour venger l’innocent ;
Ou l’on se fait crétin pour ne voir ses tourments.
Risperdal, ô toi belle saloperie,
Empoisonne la succube qui me fait roi !
Je te l’offre, oui son cœur est à toi.
Prends soin d’elle, c’est un peu toute ma vie :
Né d’une mère trop fragile pour se jouer de sa folie,
Et d’un père dévasté, moquant même jusqu’à son doux génie.
Apprends lui à sourire du mépris.
Et répare ce miroir brisé,
Cette image de mon moi déformé.
Mais surtout ne lui ôte pas la vie !
Oui, ce mal j’aime encore aujourd’hui,
Cette muraille qui m’a tant isolé,
Est devenu comme ma carapace.
Il se peut que sans elle je trépasse.
Sache qu’elle m’a aussi protégé
Dans son fort d’indolence et d’ennui.